Une histoire gamin? Je pris une bouffée sans pour autant que le cigare fut allumé Tu me prends pour une conteuse de foire? Quant à mon histoire, je ne la confie qu'à qui est jugé digne par ma personne, et toi, gamin, tu ne l'es nullement. Mais soit, je concède à te confier quelques bribes de mon passé, de mon histoire.

Je suis née au sein d'une famille qui, bien qu'elle ait des racines dans un pays qui, aujourd'hui, n'est même plus un souvenir, détruit qu'il fut par la guerre. Famille qui fut bien plus et bien moins, bien du sang s'est mêle, bien des héros ont vu le jour et sont morts, seule la branche qui fournissait armes et armures a pu perdurer et prospérer. Mère, je ne l'ai guère connue, père avait plus d'amantes que de cheveux sur le crâne. Alcoolique, il n'en était pas moins excellent forgeron, usant de méthodes certes lentes, mais hors normes pour un acier d'une qualité difficile à atteindre. Cependant, il était prompt à la violence. Mes frères, stupides, suivaient ses ordres sans jamais les remettre en cause, tel n'était pas mon cas. Il me format au combat, je ne puis le nier, pas plus que je ne puis nier qu'à sa façon, violente, barbare, il a fait de moi ce que je suis aujourd'hui.

Une rebuffade? Un tisonnier sur la trogne. Le cuir ouvert? Qu'à cela ne tienne, un peu de poudre noire, un tison, la plaie était fermée. Bien sur, mes imbéciles d'ainés n'y trouvaient rien à redire. Sergei et Alexei ne trouvaient jamais rien à redire, pis encore, ils se joignaient souvent à lui pour me mettre à mal. Je pourrais vous dire que j'ai oublié et pardonné, tel n'est pas le cas. Le sourire venimeux qui étire mes traits à de quoi glacer le sang alors que j'appuie les derniers mots.

J'ai appris de lui et d'anciens documents l'art de la forge, oh non, pas celle si communément réalisée par tout un chacun, mais celle de terres perdues, qui ne se transmettaient qu'au sein d'un même clan. J'en puis donc déduire qu'à un temps ou à un autre, nous en fûmes part. Nos créations, plus lentes à confectionner, furent plus coûteuses en raison de leur plus grande qualité. Et le sont toujours. Ajoutez à ce fait que j'ai décidé de ne forger que pour qui obtient ma bonne volonté aujourd'hui, ou se trouve prêt à payer fort cher mes créations, et vous comprendrez sans nul doute le pourquoi du faste de ma demeure.

Que pourrais-je vous dire de plus? Que de mes bourreaux, l'un goûta au vin de l'éternité, le second perdit la vie, orgueilleux qu'il fut, en mesurant ses créations aux miennes, quant au troisième... J'eus un court rire sans joie Les dieux, quels qu'ils soient, se sont chargés de solder les comptes. Ne me reste que mon plus jeune de mes frères, enfin, demi-frères, Boris, est encore de ce monde. Trop jeune lorsque je subissais, lui n'a jamais rien eu à craindre de moi. La fortune de père fut partagée entre nous deux, je récupéra de droit celle de mes frères de sang, bien que je mis une part de coté pour lui.

Depuis? Je me suis retirée dans les bois. Je forge, tel est mon art premier, même si je ne suis point ignorante de la guerre. Si bien que, pour peu que l'on s'en montre digne, j'enseigne sans peine les rudiments de mon art.

Je souris, et cette part là, je ne la lui conta pourtant pas.

Je me suis également penchée sur la cause hybride, et si tant est que je ne puisse agir ouvertement, enseigner l'art de la guerre, armer et permettre la confection de poudre noire à ceux qui luttent pour sauver les leurs est devenu un cas usuel, bien que je ne le reconnaisse pas, c'est là la raison de l'isolement de mes biens des villes.

A cela j'ajoute mon plus grand secret... Aux yeux de tous? Tasha Pavlovna... Aux yeux de ceux qui sont dans le secret de mon coeur? Sofiya, nom qui est le mien, nom de code qui signifie aussi: Je viens demander votre aide, dans la bouche d'un hybride.